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Excel Place

Focus métier : Revenue Manager – Hôtel du Collectionneur

Dernière mise à jour : 3 sept. 2019

– Eddy Mimoun partage avec Excel Place sa vision d’un Revenue Manager de qualité –


Eddy Mimoun nous fait part de son expérience en tant que Revenue Manager de l’hôtel du Collectionneur, et Président du Luxury Revenue Management Club, créé avec son associé Adlene Djekiref.


Excel Place : Le métier de Revenue Manager est très récent dans le monde de l’hôtellerie, et pour beaucoup il reste un peu vague. Pouvez-vous nous expliquer en quoi consistent les tâches d’un Revenue Manager ?


Eddy Mimoun : En effet, le Revenue Management est une discipline assez nouvelle qui consiste à maximiser les recettes au travers d’un savant jeu d’équilibre de plusieurs leviers. En comparaison avec un constructeur automobile qui optimise l’équilibre puissance et endurance d’un véhicule, le Revenue Manager, quant à lui, va plutôt optimiser l’équilibre entre le volume des ventes et le panier moyen des ventes. C’est un travail qui demande des ajustements quotidien. Pour répondre à ce challenge, le Revenue Manager jongle entre deux casquettes : celle de stratège et celle de technicien. En tant que stratège il analyse les performances historiques de l’hôtel, les évolutions du calendrier, et la mixité de la clientèle, afin d’anticiper la demande en spéculant sur chaque date. C’est un réel travail de vision, de stratégie, et d’analyse. Une fois la stratégie définie, le Revenue Manager doit la mettre en œuvre. Il va donc l’implémenter sur son site internet et chez ses distributeurs, et il va la partager auprès de ses commerciaux. Les techniques du Revenue Management ont beaucoup évolué grâce à la montée en puissance des technologies, ce qui permet au Revenue Manager de réviser sa stratégie à la hausse comme à la baisse instantanément. Le Revenue Manager doit donc comprendre comment son industrie évolue, comment ses distributeurs fonctionnent, comment il peut maximiser ses ventes auprès de chaque distributeurs et vérifier comment il peut mettre en pratique sa stratégie. Une fois la stratégie mise en œuvre, il en suit l’évolution, le résultat qui en découle, et si besoin réagit en fédérant toute son équipe autour de celle-ci.

Le Revenue Manager est un homme de l’ombre, il n’a pas forcément vocation à interagir avec les clients ou avec des agences de voyage, mais il est présent pour définir la stratégie et coordonner les efforts commerciaux qui sont mis en œuvre par les distributeurs, ou par les commerciaux eux-mêmes.


E.P. : C’est un métier très « challenging » dans lequel les décisions ont des répercussions importantes sur l’ensemble de l’hôtel. Comment les Revenue Manager arrivent-ils à gérer cette situation ?


E.M. : Il est vrai qu’être Revenue Manager peut parfois vous empêcher de dormir. Le challenge est de savoir prendre des risques sans se brûler les ailes. Par exemple, lorsqu’on estime qu’il va y avoir une très forte activité sur une date en particulier, on va se positionner au-dessus du marché en termes de prix et l’on va attendre que tous les autres hôtels soient complets pour remplir le nôtre. C’est-à-dire que parfois, nous allons vendre toutes nos chambres dans les dernières 48h avant le jour j. Forcément on en transpire un peu. Pour pouvoir être un petit plus serein dans son activité, il faut être sûr de ses prévisions, de ses indicateurs et des éléments pris en compte pour une prise de risque. Il est vraiment crucial de bien comprendre l’évolution du marché, c’est-à-dire qu’il faut comprendre d’où l’on vient, quelles sont les données historiques, et quelles sont les récurrences de comportement et  de tensions sur la clientèle à des dates spécifiques. Par exemple, durant la période de l’Air Show, le salon du Bourget qui a lieu à Paris tous les deux ans, on remarque que la clientèle est extrêmement présente, qu’elle est prête à payer très cher pour pouvoir assister à ce salon et que tous les concurrents sont complets à cette période eux aussi. Sur cette plage de données, le Revenue Manager va prendre des risques, en vendant ses chambres plus chères qu’habituellement compte tenu de la demande attendue et que tous les deux ans la même tendance de marché est constatée.


Ce qui est important quand on s’intéresse aux performances historiques, c’est qu’il faut également suivre les évolutions du marché : regarder l’avenir. Pour cela, il faut suivre des indicateurs clés comme les taux de fermeture des hôtels ce qui nous permet de comprendre le niveau de tension de la demande exercée sur le marché parisien. Il est aussi très important de partager notre stratégie avec la compagnie propriétaire ainsi que la Direction Générale. Les risques que nous prenons sont très importants et peuvent parfois créer de vraies catastrophes économiques si nous ne sommes pas sûrs de notre stratégie. Il faut avoir une réelle vision et une validation des risques que l’on prend. Nous sommes un peu des traders de l’hôtellerie, nous allons spéculer mais de manière réfléchis.


E.P. : Selon vous, quelles sont les qualités requises pour être un bon Revenue Manager ?


E.M. : Le Revenue Manager doit être un stratège, faire preuve de bon sens et avoir la capacité de prendre en compte une multitude de variables. L’objectif étant de pouvoir optimiser un équilibre entre le panier des ventes et le panier moyen. Pour cela il faut être curieux, s’intéresser à sa société, comprendre comment elle évolue, quelles sont les problématiques qu’elle présente. Le Revenue Manager est avant tout un homme de chiffres, il doit être doué pour utiliser Excel car c’est son outil de travail au quotidien. De plus, le Revenue Manager doit être un technicien, c’est-à-dire, qu’il doit bien connaître ses outils de gestion comme son Property Management System. Il doit connaître à la perfection ses distributeurs pour savoir comment maximiser leur partenariat. Le Revenue Manager ne va pas agir de la même façon sur son propre site internet qu’avec ses distributeurs. Il faut donc une connaissance globale de l’hôtel, de sa distribution, de sa commercialisation et également du retour sur la qualité.


E.P. : Vous êtes l’un des fondateurs du Luxury Revenue Management Club, pouvez-vous nous présenter ce Club et nous en expliquer les objectifs ?


E.M. : Le Luxury Revenue Management Club est une association sans but lucratif dont j’ai eu l’idée avec mon ami Adlene Djekiref, Revenue Manager aux Jardins du Marais. Nous sommes de grands amateurs de conférences et aimons découvrir les nouvelles tendances de marché. Nous savons qu’un hôtel, de manière générale est un opérateur du tourisme, mais il est tributaire d’autres acteurs du tourisme notamment des différents moyens de transport. Pour comprendre les évolutions de marché de ces acteurs du tourisme, comme l’aérien ou le ferroviaire, nous avons besoin de nous tenir informer. Nous nous sommes rendu compte qu’aujourd’hui, en tant que Revenue Manager nous n’avons pas les moyens de nous tenir informés des évolutions du marché et des différentes technologies qui sont à notre disposition. Nous avons donc créé notre propre structure pour organiser des conférences sur ces sujets et ainsi répondre à notre propre besoin. Ce sont des besoins en termes de formation continue, de suivi des évolutions du marché, mais aussi de nouvelles manières de travailler. Nous sommes réellement les moteurs de l’industrie, nous professionnalisons notre métier qui est nouveau, nous le cadrons, nous le partageons, notamment dans les écoles afin de transmettre notre passion, le Revenue Management et bien sûr l’hôtellerie. Aujourd’hui, notre club réunit une trentaine de Revenue Manager expérimentés de l’hôtellerie haut de gamme à Paris (4*, 5* et palaces) que nous sélectionnons. Nous nous réunissons de manière trimestrielle autour de conférences et de workshops.


E.P. : Comment le Revenue Management impacte-t-il sur la qualité de service d’un établissement ?


E.M. : C’est une problématique à laquelle nous faisons face en Revenue Management. Il y a une différence entre la qualité de service conçue par l’hôtel et la qualité de service perçue par les clients. Plus les prix sont élevés et plus les attentes de la clientèle sont supérieures. Si en tant que Revenue Manager du Collectionneur je baisse trop mes prix, je vais aller prendre des parts de marché à l’hôtellerie 4*. Sauf que cette clientèle n’est pas forcément habituée à dormir dans des 5*, elle a des attentes et des exigences différentes et parfois même supérieures à celle d’un client habitué de 5*. Il faut donc avoir un regard très vigilant par rapport à ce type d’actions promotionnelles car elles peuvent être contreproductive sur la qualité perçue, engendrer des insatisfactions clients et des mauvais commentaires/notes sur les sites de satisfaction clientèle comme TripAdvisor.



EXCEL PLACE


Source :

Entretien avec Eddy Mimoun

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